De tout temps, la Police a toujours été confondue avec sa soeur Justice comme force devant appliquée la Loi. Si cela est parfois vrai dans certains pays, l'exercice de la Police et donc de la sécurité, se sert de la Loi comme référentiel répressif mais de la morale comme référentiel préventif.
Pourtant, de nombreux maires préfèrent donner la sécurité comme affaire régalienne de l'Etat, en dépit même du fait que l'exercice de la Police se devrait être indépendant de la Justice, de l'Etat et de la population. La Police ne doit pas être un instrument au service de la vindicte populaire ou de l'oppression étatique, sans quoi elle ne peut posséder une quelconque crédibilité.
La Police et la Loi
L'exercice de la Police est, pour beaucoup, conditionnée par l'application des lois et des arrêtés. Si dans un pays démocratique la jurisprudence constitue un socle structuré suivant les contours de la morale en vigueur, il n'est pourtant pas aisé de concilier l'application systématique de la législation en vigueur et les impératifs de sécurité.
De prime abord, la Loi détermine que la Police, sous l'égide du Ministère de l'Intérieur, "assure le bon ordre, la sécurité, la salubrité et la tranquillité publique." Si bien entendu, par leur statut d'agents de police judiciaire, les policiers sont soumis aux jurisprudences, les agents de police peuvent aussi faire appel à un faisceau méconnu, y compris des policiers eux-mêmes, des pouvoirs de police : la police administrative.
Cette police administrative s'oppose à la police judiciaire en cela qu'elle n'a pas un but répressif puisqu'elle ne repose pas sur l'application d'une loi mais sur la veille des équipages de police à ce que le bon ordre, la sécurité, la salubrité et la tranquillité publique soient respectés. Malheureusement seule la Gendarmerie et les polices municipales pratiquent cet art ancien de la police de prévention, la Police Nationale reposant sur sa sacro-sainte police judiciaire. En effet, une grosse partie de la mince doctrine policière repose sur l'application de la police judiciaire et uniquement cette dernière, donc à l'abdication devant les lois.
Mais beaucoup de lois vont à l'encontre de la mission première sécuritaire des missions de police, principalement les lois régissant les moeurs comme celles afférant au port du voile. Couramment, cette question revient sur le tapis, 100% du temps portée par un contrôle d'identité effectué par des policiers nationaux qui aurait mal tourné ... et comment cela pourrait-il tourner autrement lorsque visiblement on diabolise une religion ?
C'est aussi sous le spectre du maintien de l'ordre que nous retrouvons cette mauvaise application des pouvoirs de police, comme récemment lors des évacuations de camps de migrants effectués par les CRS et les CDI (dont nous parlerons dans un autre article). Ces évacuations ordonnées par la Justice et donc effectuées sous le spectre judiciaire (il ne s'agit ici aucunement de prévention), sont là encore non pas effectuées dans un but sécuritaire mais proviennent d'un ordre étatique, politique et par extension, d'une opinion d'un gouvernement ou d'un peuple. On voit ici la "consanguinité" justice-politique, qui marque une chose : ni le pouvoir politique, le pouvoir judiciaire ou policier ne sont indépendants malgré la démarcation essentielle et nécessaire qu'il faut mettre en évidence lors de la pratique desdits pouvoirs.
C'est vraiment ici que l'on touche le problème épineux de l'indépendance du pouvoir policier (et judiciaire), car si, par exemple, les militaires sont libres de leurs interventions, donc libres de leur doctrine et de leur stratégie sécuritaire, sur le territoire national en revanche les superviseurs ne sont pas décideurs et l'indépendance policière est inexistante. Cela explique, en partie, le manque de doctrine et de modernité des polices françaises dont le seul esprit de réflexion est confié, non pas aux généraux ou directeurs mais aux politiques, sur des visions à court terme, et avec peu de réflexions sur ce sujet.
Bien entendu cette problématique est amplifiée en police municipale, dans les collectivités territoriales, où les maires et les adjoints, seuls, tentent avec leur flagrante incompétence de mettre en place des services de police municipale bancales qui parfois implosent comme à Aix-en-Provence, ou qui d'autre fois deviennent des polices politiques comme à Nice ou Levallois-Perret. Malgré tout, la situation au niveau étatique n'est pas forcément meilleure, loin s'en faut, et tant que les superviseurs ne seront pas décideurs, cela n'est pas prêt de changer.