À chaque salon aéronautique son projet de voiture volante, et le salon Aero de Friedrichshafen ne fait pas exception à cette règle. Après l'Autoplane, l'Aerobile, l'Airphibian, l'Aerocar, l'Aerauto et les nombreux projets au nom très certainement tirés d'un dictionnaire de blague réalisés entre 1917 et aujourd'hui, voici que l'on nous a présenté la ... Carplane (sic).
Un projet irréalisable et inutile
À l'instar des projets qui l'ont précédée, la Carplane va très certainement se révéler être un très mauvais avion par son aérodynamique pitoyable et sa lourdeur, et une très mauvaise voiture par sa longueur et sa maniabilité quasiment proche du néant. Néanmoins les concepteurs de cette voiture auraient pu le prédire aisément rien qu'en réflechissant d'une manière plus globale s'agissant de l'utilité d'une telle chose.
Justement, réfléchissons. Nous savons par exemple que les hydravions font de mauvais bateaux et de mauvais avions, mais s'ils ont eu leur succès à une époque c'est parce qu'ils s'affranchissaient de certaines contraintes dont posséder un aéroport. Il suffisait alors de trouver un simple plan d'eau et voilà que votre hydravion pouvait décoller et atterrir à convenance ; ce qui, sur une planète composée à presque 80% d'eau, n'est pas si difficile à trouver.
Mais ici, qu'est-ce que nous apporte la voiture volante ? S'affranchir des contraintes du trafic ? Pas tellement, puisqu'il faudra les subir pour se rendre jusqu'à l'aéroport. Rendre accessible le voyage aérien ? Non plus, il faudra toujours passer ses licences de pilote et puis en général les prix annoncés sont bien au-dessus des 200 000€, sans compter le garage nécessaire à héberger des véhicules de cette envergure. Peut-être est-ce que cela va apporter quelque chose à l'aviation alors ? Bah ... non. Ce sont des avions avec une aérodynamique pitoyable donc des performances comparables, et puis les avions sont déjà dotés de roue, pas besoin d'avoir des pneus de 18" avec jantes pour atterrir sur un aéroport.
D'autant que, une voiture volante pour transporter 2 personnes pèse en général autour des 1200-1500kgs, quand ce n'est pas plus, la faute aux systèmes qui permettent de plier les ailes et donc de rouler sur route sans construire des chemins de plus de 10m de large. En comparaison un avion quadriplace pèse aux alentours des 500 à 1000kgs ... avec une aérodynamique avantageuse qui plus est !
Il y'a donc pour la voiture volante de sacrés pénalités énergétiques et aérodynamiques qui remettent en cause sérieusement tous les projets ... qui finissent tous par péricliter les uns après les autres, notamment parce que la certification d'un avion demande toujours des refontes de certaines parties du fuselage et que cela est presque impossible à effectuer avec une voiture volante. Au final tout cela engendre surcoûts et retards, les entreprises n'arrivant jamais à soutenir ni le calendrier, ni les finances, aucune voiture volante n'a jamais atteint le stade final de conception ou eu un quelconque succès.
La solution chez les voilures tournantes ?
Une solution pour réellement s'affranchir du trafic, condition sine-qua-non du véritable succès d'une voiture volante, serait l'utilisation du modèle de l'hélicoptère comme la Pal-V One. Mais là encore, de réel soucis impactent la création d'une voiture volante "hélico" à commencer par le coût engendré par le véhicule.
Un hélicoptère est, et de loin, bien plus coûteux à entretenir que ne le serait un avion et il en va bien entendu de même s'agissant de la consommation en carburant. Ainsi, même le coût de construction et donc le prix d'achat, sont bien supérieurs sur hélicoptère. La Pal-V One est estimée entre 250 et 400 000€ pour pouvoir transporter 2 personnes.
Malgré tout, la Pal-V One est légère, d'une masse de 600kgs, mais pour cela il a fallut faire de larges sacrifices. Premièrement la Pal-V One ne décolle pas verticalement, il lui faudra une trentaine de mètres pour pouvoir décoller car son rotor principal n'est pas alimenté, pour économiser des parties mécaniques lourdes, et utilise le principe de l'autogire. Deuxièmement, là encore pour économiser de la masse, le véhicule est muni du strict minimum en matière d'instruments le contraignant au vol à vue de jour et en-dehors des traversées maritimes (exit les trajets Cannes-Corse) ou de tout trajet nécessitant une once d'instruments.
Enfin, ces caractéristiques sont tout aussi exécrables que les autres prototypes en plus d'avoir choisi le modèle de l'hélicoptère, et donc d'avoir condamné définitivement la Pal V One au voyage. Avec une vitesse de croisière de 180km/h pour une autonomie hors réserve de 350km (donc avec une réserve de 45 minutes : 220km), ce véhicule est plus que limité.
En conclusion ...
Si vous possédez un jardin d'une longueur minimum de 100m (30m sans vent et à 15°C en conditions atmosphériques standards et sans obstacles), au moins 400 000€ sur le compte bancaire, que vous habitez à un endroit où il y'a des conditions très favorables, notamment en terme de vent (pas plus de 20kmh de vent, sinon c'est foutu), que vous êtes prêt à consommer plus de 60l pour parcourir 180km en une seule heure sous réserve que les conditions ne changent pas et que vous n'avez pas peur des coûts engendrés (assurance, entretien, taxes éventuels, etc.) vous aurez alors accès une voiture volante !
Ou plutôt un aéronef qu'on essaiera de faire rouler.